Une structure sociale pyramidale de la société, semblable à celle de l’Angsoc de 1984


« Le monde se divise en trois catégories de gens : un très petit nombre qui fait se produire les événements, un groupe un peu plus important qui veille à leur exécution et les regarde s'accomplir, et enfin, une vaste majorité qui ne sait jamais ce qui s'est produit en réalité » Nicholas Murray Butler, homme politique, philosophe et président de la Pilgrims Society.


L'Angsoc, le régime de l’Océania dans "1984", divise le peuple en trois classes sociales :

  • Le « Parti Intérieur »
classe dirigeante au pouvoir qui concerne 2% de la société
  • Le « Parti Extérieur »
travailleurs moyens, 13% de la population
  • Les « Prolétaires »
85% de la société est composée de la sous-classe qui s'entassent dans les quartiers sales. 



Dans le "Meilleur des Mondes", on retrouve aussi cette société de castes, de nature profondément inégalitaire, partagée entre les Alphas qui occupent le sommet de la pyramide sociale, les Bêtas, les Deltas et les Epsilon, véritables clones qui sont dénués de toute personnalité et s'acquittent des tâches les plus basiques. Tous ces individus sont des jumeaux, des clones de laboratoire dans un soucis d'efficacité maximale. Pour qu'ils supportent leur sort, tous ces esclaves sont conditionnés de manière intensive, jusque dans leurs rêves, à travers des enseignements "hypnopédiques" suggestifs ou grâce à l'usage de drogues et des décharges électriques. Ce qui ne manquera pas de faire penser au contrôle mental MK ultra et aux recherches sur le conditionnement et la manipulation mentale évoqué plus tôt dans ce livre. Dans notre société pseudo démocratique, les luttes de pouvoir ne s'expriment pas de manière trop visible et violente, car les rapports de force ont étés intériorisés par tout un chacun, ils sont implicites.

Mais, en dépit de cette égalité présumée, nous avons une société avec une organisation sociale hiérarchique, avec une structure pyramidale où une armée d'esclaves laborieux triment pour enrichir le sommet de la pyramide qui capte de plus en plus toutes les richesses et assèchent même l'économie mondiale.

Dans notre société moderne, chaque strate de cette pyramide est parfaitement cloisonnée et il n'y a plus du tout de mixité sociale, plus aucune interaction entre les différentes classes et couches de la société. On peut comparer le parti intérieur du livre d'Orwell à la classe dominante et dirigeante, qui occupe la structure de contrôle de la société. Elle ne concerne que quelques milliers d'individus de par le monde. Ce sont eux les réels détenteurs de la richesse et du pouvoir. Ils sont les grands gagnants de la mondialisation et vivent complètement coupés du reste de la populace. Ils sont regroupés dans des ghettos pour riches, concentrés dans quelques zones urbaines, dans les grandes capitales, dans des zones où l'immobilier est devenu tout simplement inaccessible pour le commun des mortels. C'est une forme de ségrégation sociale géographique qui s'opère par l'argent. Il s'agit d'une hyper-classe hors-sol, cosmopolite et apatride, concentrée dans les beaux quartiers. Ils sont plongés dans leur petite bulle de bonheur et d'insouciance, à des années-lumières des préoccupations du reste de la population. Cette caste culturo-mondaine est constituée de bobos, qui travaillent souvent dans les secteurs des grands médias, dans l'édition, dans les hautes technologies, dans les banques d'affaires, de la mode, du show business, des grandes entreprises. Elle comprend aussi les grands chefs de projet et exécutants intellectuels et politiques.

Pour se figurer à quel point cette petite caste est déconnectée du reste de la population,, on peut citer les propos totalement perchés et surréalistes du PDG de Goldman Sachs,  Lord Blankfein : « Je ne suis qu’un banquier faisant le travail de Dieu. » Ils considèrent donc qu'ils possèdent le pouvoir de vie ou de mort sur le reste de la population. Contrairement au reste de la masse, qui est éclatée et divisée, jusqu'au cœur des familles qui s'entredéchirent régulièrement avec une explosion des divorces, cette classe à une conscience très aiguë d'elle-même et de ses intérêts. Elle fonctionne en vase clos, dans l'entre soi, par cooptation et est parfaitement organisée, pour assurer le maintien et le renouvellement sans partage de sa domination. C'est une classe qui arrive à s'auto-reproduire de générations en générations. Elle repose et s'appuie sur la stabilité, sur la perpétuation de dynasties familiales, qui reposent sur des valeurs traditionnelles de transmission, pour éviter à tout prix que les fortunes ne ruissellent à l'extérieur de ces milieux. Cette classe arrive à prendre le contrôle du politique, grâce à la complicité de ses acteurs, pour s'accaparer les lois, afin qu'elles servent exclusivement leurs intérêts privés et bien compris.

Quand au "Parti Extérieur" décrit par Orwell, il correspond à un nombre sensiblement plus élevé d'individus que ceux qui composent la classe dirigeante. Cette classe intermédiaire est composé de cadres, de professionnels, d'enseignants, d'administrateurs et de bureaucrates, qui jouent un rôle de courroie de transmission entre le haut de la pyramide et sa base. Ces individus sont souvent dotés d'une conscience relativement faible et marginale. Leur fonction est de guider la population, les travailleurs, les épargnants, etc. Enfin, tout en-dessous, à la base de la pyramide sociale, qui correspond à la classe des prolétaires de "1984", nous avons la classe majoritaire, celle constituée de la plus grande partie de la population. Il s'agit de la part la plus maniable et malléable des individus, aussi bien dans leur travail que dans leur mode de pensée ou dans leur système de valeurs. Ce sont souvent des individus à faible capacité critique, d'initiative, d'autodiscipline et de responsabilité.

Chez-nous, elle correspond à la France périphérique, à la France profonde. C'est la France des oubliés, des laissés-pour-compte, qui vivent dans des zones sinistrées, délaissées par les services publics, avec la fermeture des services de proximité, des écoles, des hôpitaux, etc. C'est aussi la France qui paradoxalement, est la plus imposée, mais qui n'a plus aucune prestation ou contrepartie en retour… C'est également la France des travailleurs nomades, qui ont un besoin vital de leur voiture pour se rendre à un travail de plus en plus éloigné de leur domicile, mais aussi pour pouvoir encore bénéficier des infrastructures et des services qui font leur font cruellement défaut localement. C'est la France des gilets jaunes, celle qui est frappée de plein fouet par l'augmentation du prix de l'essence…

Metropolis, un modèle de société visionnaire

Cette répartition des classes sociales rappelle aussi un autre grand classique cinématographique : Metropolis. Cet incontournable film de science-fiction muet de 1927, qui demeure l'un des plus beaux représentant et joyau de l'expressionnisme allemand, fut l'œuvre du cinéaste Fritz Lang en 1927. Ce film de science-fiction, intemporel et incroyablement visionnaire, est particulièrement prisé par les élites, y compris par Hitler en son temps.

L'histoire du  film se déroule en 2026 et nous parle du contrôle d'une société par une petite élite d'oligarques, à l'aide de la maîtrise des technologies. À la base de cette société, des centaines d'esclaves déshumanisés, soumis et résignés, à la démarche robotique et mécanique, viennent s'affairer et travailler dans les bas-fonds d'une cité ouvrière, un véritable enfer sous terre, placé sous haute surveillance... Ces pauvres bougres sont littéralement immolés sur l'autel de Moloch, une énorme machine mécanique. Les ouvriers sont jetés vivants dans l'infernale gueule du monstre de fer. On peut établir un parallèle avec l'ultra capitalisme actuel et sa religion de l'argent, le culte de  Mammon, qui se nourrit aussi du sacrifice et de l'exploitation impitoyable d'un grand nombre d'humains pour fonctionner. La riche et florissante cité supérieure, semblable à une immense Babylone est dirigée par une sorte d'Antéchrist, Joe Frederson, le maître de la cité. Il loge dans une immense tour, qui de par sa démesure, est comparable à la Tour de Babel, tour qui sera d'ailleurs clairement évoquée par la suite dans le film.

On appréciera l'immense Pentagramme en arrière-fond de l'humanoïde, ce robot a depuis été repris à de nombreuses reprises dans des clips de musique pop notamment par la chanteuse Beyoncé, c'est dire l'importance symbolique  qu'il revêt pour les élites...

Frederson maîtrise les hautes technologies... dont la robotique. Chose tout à fait inouïe et incroyable, ce film visionnaire parle déjà, avant l'heure du Transhumanisme, avec une femme robot-cyborg qui se dresse devant un immense pentagramme inversé. Ce robot mi-homme, mi-machine, sorte de nouvel homme divinisé, devient l'objet d'une vraie vénération dans la suite du film... Ce qui est la transgression ultime, car l'homme se vénère lui même, dans tout son orgueil et délaisse son créateur.


La ville décrite dans le film rappelle la Babylone de la Bible, mais aussi la Tour de Babel et renvoie aussi aux immenses cités édifiées de nos jours, notamment en Arabie Saoudite avec le faramineux projet de ville futuriste de NEOM ou encore celle de Dubaï, dans les Emirats Arabes. Là aussi, ces cités sont édifiées dans le sang, au prix du sacrifice de nombreuses vie humaines. Dans la ville de Metropolis, à la surface, dans la ville haute, pendant que les esclaves sont immolés sur l'autel du profit, les élites jouissent d'une vie paisible, insouciante, faite de plaisirs indolents et de culture... Ils vont au théâtre, s'adonnent à des sports de plein air dans de luxuriants jardins suspendus. Ils rayonnent de vie, de joie et de bonheur. Le contraste entre les deux mondes est absolument saisissant !

De la légitimité du pouvoir des classes dirigeantes

Après cette digression, pour en revenir à notre société contemporaine, elle a une structure pyramidale similaire en tout point à celle décrite par Orwell ou Fritz Lang... On pourra d'ailleurs constater qu'à travers toute l'histoire et toutes les civilisations, l’intégralité des groupes humains ont toujours adopté une structure sociale hiérarchique, même dans des sociétés fort hypocritement prétendues égalitaires...

Le haut de la pyramide étant systématiquement occupé par un petit groupe oligarchique, parfaitement organisé et agissant, qui dirige par la ruse une masse informe, totalement atomisée et passive. Ceci étant sans doute lié à la psychologie humaine, où seule une poignée d'individus déterminés est vraiment intéressée par la conquête et la conservation du pouvoir, tandis que la majorité n'y est pas du tout sensible. Par conséquent, il est bien naturel et mécanique que nous héritons systématiquement des pires arrivistes, prêts à toutes les compromission et abjections pour se maintenir au sommet de la pyramide.

Dans les sociétés dites traditionnelles, ce sont des clercs et des classes sacerdotales qui occupent le sommet de la société. Elles sont légitimés par le fait qu'elles incarnent l'autorité spirituelle et représentent une certaine noblesse d'esprit et de sagesse. De plus, elles ont à cœur d'assurer le bien commun et la stabilité de la société. Le pouvoir est alors apparent et parfaitement identifiable. Tandis que dans le monde moderne, le pouvoir réel est détenu par une oligarchie, ou plutôt une ploutocratie, une hyper-classe économique, constituée d'une poignée de banksters, de marchands, ainsi que d'une haute bourgeoisie affairiste, qui est parasitaire et invisible, car masquée derrière des institutions au vernis pseudo-démocratique, dont elle contrôle en réalité tous les rouages et leviers de pouvoir. Ces élites s'organisent dans des réseaux d'influence discrets ou secrets.

Pour compenser leur absence de légitimité et se maintenir au pouvoir, ils sont contraints d'user de manipulation, d'ingénierie sociale, de propagande et de duperie. Cette caste ne peut régner et asseoir sa domination qu'en organisant de fausses divisions au sein de la société, avec la création de camps opposés artificiels, comme entre les différents partis et sensibilités politiques, de droite ou de gauche, progressistes et conservateurs, nationalistes et mondialistes ; Entre les sexes, hommes et femmes ; Entre les orientations sexuelles, hétérosexuels, homosexuels ; Entre diverses croyances et confessions religieuses, chrétien ou musulmans ; Entre les modes de vie et de consommation, Vegan ou amateur de viande ; etc… 

La technocratie concentre tous les pouvoirs

Avec l'accélération de la mondialisation, les inégalités dans la répartition des richesses sont de plus en plus béantes, elles explosent à un niveau jamais égalé : 82% de la richesse créée en 2017 aurait été absorbée par seulement 1% de la population mondiale, d'après l'Institut Oxfam. Ainsi, les classes moyennes tendent progressivement à disparaître et la classe la plus miséreuse tend à se généraliser ! Nous aurions alors une pyramide sociale ne comprenant plus que deux seules strates réparties entre les ultras riches et les ultras pauvres.

Il est vraisemblable qu'à l'avenir, ces inégalités déjà profondément indécentes, ne feront que croître encore plus, séparant inexorablement la plèbe et ceux qui auront les moyens d'une puissance et d'une domination sans faille et partage qui leur sera assurée par : la maîtrise technique de la technologie et des machines, avec le Transhumanisme, le contrôle du vivant et de la matière, avec les manipulations génétiques et la maîtrise de la matière et de l'assemblage artificiel des atomes ou encore, la maîtrise des ressources de la terre avec les produits du sol, du sous-sol et des océans. Cette nouvelle et implacable Technocratie concentrera ainsi entre ses mains tous les avoirs, les savoirs et le pouvoir !

Tout cela rappelle aussi grandement la société décrite dans un autre film de science-fiction, ou plutôt d'anticipation, "Elysium" de Neill Blomkamp, où il n'y a plus que deux classes dans la société, les ultras riches et tous les autres. Cette caste de privilégiés hors-sol vit en orbite, dans une station spatiale, en forme de pentagramme, une paisible arche préservée de tout chaos, Elysium. Il s'agit une sorte de ghetto spatial pour riches, ultra-moderne et technologique, totalement coupé des bidonvilles terrestres délabrés et du reste de la population qui se débat dans toutes sortes de trafics pour assurer sa survie quotidienne.

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